Algérie : les élus locaux témoins de la dégradation de l’environnement

A Alger, les visites d’inspection des élus locaux ne semblent guère suivies d’effets sur la qualité de l’environnement.

 

par M’hamed Rebah

 

Incidemment, en faisant le constat de la dégradation du cadre de vie, il arrive aux élus locaux, particulièrement dans la capitale, de soulever des questions environnementales en suspens depuis de longues années alors qu’elles sont perceptibles par tous, citoyens et autorités.

 

Cet été, une délégation de l’Assemblée populaire de wilaya d’Alger (APW) a fait une tournée sur les plages. Que lit-on dans le compte rendu donné par l’Agence officielle de presse (APS) ? « Le constat général des plages du littoral ouest d’Alger est le manque d’hygiène, flagrant, et la mauvaise qualité bactériologique des eaux de baignade, en raison du déversement anarchique des eaux usées en mer ». Il s’agit, ici, des plages autorisées à la baignade, seules concernées par la visite d’inspection des élus. Ce qu’ils ont dû relever aussi, c’est la présence des déchets sur les plages et dans l’eau, constitués en grande partie par les sachets, bouteilles et autres emballages en matière plastique.

 

Les élus vont sans doute faire leur rapport et l’adresser aux autorités concernées, comme c’est la règle. Quelles suites seront données aux recommandations d’usage que comportent en général ces rapports d’inspection ? Pour le savoir, il faut attendre la rentrée scolaire et aller faire un tour dans les établissements d’enseignement pour voir si la visite d’inspection faite par les élus, au début de cette année, dans des écoles primaires, collèges d’enseignement moyen et lycées, a servi à quelque chose.

 

Les élus avaient été surpris de constater « la présence de décharges aussi bien à l’intérieur des écoles que dans les alentours immédiats des établissements ». En face d’un CEM, ils ont vu un oued où sont déversées des eaux usées, un véritable égout à ciel ouvert ; dans la cour d’un autre CEM, une « énorme décharge » à l’intérieur même de l’établissement.

 

Ils venaient de découvrir l’état dégradé de l’environnement dans lequel les élèves poursuivent leurs cours, avec en plus : les trottoirs défoncés squattés par les voitures en stationnement obligeant les enfants à emprunter la chaussée avec le risque d’accidents que cela comporte, le niveau élevé de pollution de l’air avec une grande circulation automobile à vitesse réduite à cause du stationnement et des bouchons qui se forment très vite dans les ruelles où se trouvent ces établissements, et avec les embouteillages, fatalement les coups de klaxons abusifs, interdits par le code algérien de la route.

 

Faut-il conseiller à ces élus algérois d’aller faire leurs courses au marché Redha Houhou, puis remonter la rue Hamani (ex-rue Charras) ou de l’autre côté se diriger vers la rue Khelifa Boukhalfa ? Ils seraient édifiés sur le cadre de vie. Dernièrement, des enfants venus du Canada passer leurs vacances à Alger avec leurs parents algériens, ont exprimé énergiquement leur colère, en public, à leur mère pour les avoir fait passer par l’allée qui longe le marché et qui commence par la benne à ordures qui laisse échapper une odeur nauséabonde insupportable.

 

Les élus ne devraient pas rater le carrefour de la Grande Poste, à Alger, où un écran numérique géant posé sur un camion – lui-même stationné depuis à peu près deux mois, sur le trottoir dont il occupe un espace appréciable enlevé aux passants – projette chaque soir un film à un public qui se réduit à quelques spectateurs assis en face, en fait des gens qui ont l’habitude de passer le temps à cet endroit et qui ne le quittent pas une fois la projection terminée, ce qui prouve qu’ils ne sont pas là spécialement pour voir le film. Un tel constat aurait dû pousser les initiateurs de ces séances de projection à arrêter l’opération devenue inutile, ce qui aurait eu pour effet immédiat de mettre fin aux nuisances sonores imposées aux riverains.

 

Mais, finalement, quel est le but de ces tournées d’inspection si elles ne contribuent pas à améliorer le cadre de vie de la population ? Un peu de propreté, moins de bruit, un air plus respirable, c’est trop demander aux autorités locales ?

 

Cet article a été publié dans le magazine algérien Reporters.