Voyage des JNE à Totnes (Devon), en Angleterre

Voici le compte-rendu  du voyage des JNE à Totnes (Devon), en Angleterre, qui a lieu du 8 au 10 mai 2014.

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par Roger Cans

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Participants : Marie Arnould, Danièle Boone, Jean-Pierre Caldier, Roger Cans, Jean-Luc Fessard, Myriam Goldminc, Claire Lecoeuvre, Florence Leray, Sylvie Mayer, Carine Mayo, Jean-Claude Noyé, Jean-Jacques Raynal, Diana Semaska, Michel Sourrouille, Richard Varrault.

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Le rendez-vous est à la gare du Nord à l’aube pour embarquer dans l’Eurostar de 7 h 43. Tout le monde est là et à l’heure. Carine distribue les billets. Arrivée à 9 h (locales) à la gare de Saint Pancras, véritable cathédrale de briques. On prend ensuite le tube circulaire jusqu’à la gare de Paddington. Là, embarquement dans le train (diesel) pour Exeter, puis un autre pour Totnes, qui longe par moments le littoral, à ras des flots. Curieuses falaises d’argile rouge, dont l’érosion colore la mer.
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Premier jour : Totnes

Totnes-Pound
Hal Gillmore nous attend avec deux taxis collectifs (le minibus de l’association est en panne) qui nous emmènent avec nos bagages à l’hébergement (The Old Forge) puis au restaurant (Bay Horse Inn) où nous est servi un repas froid bio, avec bière locale que nous oublions de payer (on remboursera ensuite). Puis c’est une promenade touristique à pied, qui commence par un jardin communautaire installé dans un ancien terrain vague dépotoir. Sur une vitrine : « Totnes pounds accepted here », qui signifie que le magasin accepte le paiement en monnaie locale, dont Hal nous montre des échantillons.


Pruw Boswell © Danièle Boone
Pruw Boswell © Danièle Boone


Hal nous explique que Totnes est une vieille ville, très touristique. Il y a plus de monuments classés par habitant que dans toute autre ville du Royaume Uni. Nous empruntons la rue principale, très commerçante, en passant sous les arcades médiévales de Butter Walk. Nous avons rendez-vous avec la maire au Guild Hall, le vieil Hôtel de ville, construit en 1359 sur les ruines d’un monastère, fondé en 1086 par des moines venus d’Angers. La maire, Pruw Boswell, avoue qu’elle est la première femme à occuper ce poste. Elle est très fière que sa commune (8.500 habitants) soit la première ville du monde en transition, grâce à la venue de Rob Hopkins – un Irlandais ! – en 2006.

D’où l’appellation de TTT pour Transition Town Totnes. Le budget de la commune se monte à 225.000 livres (environ 300.000 euros). Le plus grave problème est actuellement celui du logement, avec la venue de riches retraités ou résidents secondaires qui font monter les prix de l’immobilier. Une action mémorable de TTT : la campagne menée contre l’installation du café Costa, multinationale jugée indésirable dans une ville qui veut privilégier les circuits courts et la production locale. Au premier coup d’œil, hormis les commerces bio et les panneaux solaires sur la salle des fêtes, Totnes ressemble à toutes les villes, avec une circulation automobile dense. La transition ne fait que commencer…
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Reconomy Centre

Reconomy-center © Danièle Boone


Hal Gillmore nous emmène au Reconomy Centre (incubateur d’entreprises), lieu d’accueil financé par le District où l’on prêche la bonne parole d’une nouvelle économie, à base de transition énergétique, de recyclage et de partage des compétences. Marie Arnould se dévoue pour la traduction, car tout est naturellement en anglais. Or tous les JNE ne sont pas anglophones. Hal est né dans une ferme à quelques kilomètres de là. Il a fait des études de biologie marine, mais il s’est recentré sur le tourisme, l’écologie et le développement personnel. Sa vocation lui est venue en 2008 avec le film d’Al Gore (Une vérité qui dérange). Il a joué plusieurs rôles dans TTT avant de devenir Project Manager. Attention à ne pas confondre TTT et le Mouvement pour la transition énergétique, qui est devenu un réseau international grâce à Internet. En 2005-2006, on a surtout insisté sur le changement climatique et le pic pétrolier. Le projet était très ambitieux. On voulait réduire la consommation de moitié vers 2020-2030. Le film de Rob Hopkins sur La fin des banlieues a secoué le public étudiant. « En 2007 et 2008, nous avons organisé des cours de formation. Après l’excitation des premiers temps, on est arrivé aujourd’hui à la consolidation. On parle aussi bien de permaculture que d’un plan d’action pour l’énergie. On encourage le do it yourself. Chacun doit devenir un community activist. »

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Pour résumer, l’objectif de TTT est :
1) Construire la résilience.
2) S’attacher au niveau communautaire.
3) Relocaliser.

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La parole est alors donnée à Jay Tompt, le responsable du Centre. Il se méfie de la décroissance comme théorie, car ceux qui en parlent ne font rien. « Nous voulons faire ». On relocalise pour lutter contre la globalisation et les multinationales. Il s’agit de retrouver la maîtrise de ses choix et donc d’instaurer une économie alternative, avec l’exemple de la monnaie locale et les circuits courts. « Ma dépense est ton revenu ». Les deux tiers des dépenses alimentaires profitent aux grandes surfaces. Si on réduit ces dépenses de seulement 10 % au profit du petit commerce local, cela peut rapporter 2 millions de livres à la communauté. Cela redonne aussi un sentiment d’appartenance, d’identité.

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Riverford

A Riverford © Jean-Jacques Raynal
A Riverford © Jean-Jacques Raynal


On nous emmène en fin de journée au domaine de Riverford, une ferme achetée en 1950 par un certain Watson, dont le fils, après un séjour aux Etats-Unis, a repris l’exploitation en passant au bio. 70 % de la surface est en pâtures, et le reste est consacré à la production de fruits et légumes. On ne vend pas de paniers à des adhérents, comme dans les AMAP, mais des boîtes de fruits et légumes sont vendues aux clients dans tout le pays.

Une incertitude sur la production : 30 boîtes par jour ? 300 boîtes par semaine ? 30.000 ou 40.000 boîtes par an ? Toujours est-il qu’il s’agit d’une production quasi industrielle, qui nécessite d’importer parfois pour compléter. Une ferme a même été rachetée en Vendée pour les primeurs, mais ce n’est pas tellement concluant. La difficulté, c’est le « trou » du printemps, lorsque les stocks d’hiver sont épuisés et que les récoltes suivantes ne sont pas mûres (le fameux hunger gap, le trou de la faim). Le fils Watson n’a pas cherché à s’agrandir en rachetant des terres voisines. Il préfère engager les exploitations agricoles de proximité dans un mouvement de coopération.

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Le restaurant de Riverford © Carine Mayo
Le restaurant de Riverford © Carine Mayo



Au dîner, servi sur place, l’entrée est constituée de salade verte, de betteraves rouges, d’asperges et de graines de potiron. Il y a une grande variété de desserts, mais un seul par personne… Le vin rouge, à la carte, est espagnol et pas terrible.

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Deuxième jour : un peu d’histoire

Hal Gillmore © Danièle Boone
Hal Gillmore © Danièle Boone


Hal nous conduit à pied de l’hôtel Old Forge au Reconomy Centre. Il en profite pour nous donner une leçon d’histoire. Il rappelle que les Vikings ont été les premiers à envahir l’Angleterre, alors peuplée exclusivement de Saxons. Mais, dans le Devon comme dans le reste de la Cornouaille, les Saxons ont résisté. Puis ont débarqué les Normands. D’où les ouvrages de défense, dont il reste le vieux château médiéval de Totnes. La ville se trouve juste à la rencontre de la rivière Dart et de la marée, qui peut varier de 5 mètres. La vallée, qui comptait beaucoup de moulins, était riche (commerce de la laine, surtout). Totnes est vite devenue un foyer de marins et de pirates. Elisabeth 1ère, fille d’Henry VIII, a permis à l’Angleterre de prendre la place de l’Espagne sur les mers. Totnes est à la fois une ville commerciale et une place forte, dotée d’une école militaire. Avec la menace de Napoléon, le pays se couvre d’ouvrages de défense. Mais, après les Normands, nul n’a pu débarquer en Angleterre. Ni les Espagnols, ni les Français, ni les Allemands…

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Aujourd’hui, la première activité économique de Totnes est l’immobilier. La deuxième est le service à la personne (surtout personnes âgées). La démographie locale est en forme de sablier, large à la base (les enfants) et au sommet (troisième âge). Manquent les 20/40 ans. La troisième activité est le tourisme et la quatrième l’agriculture.

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Le remue-méninges d’Ines Aponte

Echange entre Ines Aponte et Jean-Claude Noyé © Danièle Boone


Anglaise originaire du Chili, Ines Aponte explique qu’elle a changé de comportement il y a six ans après avoir lu Ken Wilber. Ce dernier a défini quatre étapes : 1) histoire personnelle intime. 2) Comportement et choix de vie. 3) Le collectif vécu intimement. 4) Le collectif qui crée les structures. Elle a aussi découvert un économiste chilien, Manfred Max-Neef, qui, après un séjour au Pérou, a défini ce qu’il appelle « l’économie aux pieds nus », c’est-à-dire un développement à l’échelle humaine. Il constate que l’homme doit satisfaire 9 besoins fondamentaux. Lorsque ces besoins sont satisfaits, en synergie, on débouche sur une culture.

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Ines nous embarque alors dans une séance de remue-méninges, où notre groupe, divisé en trois sous-groupes, doit écrire sur des post-it tout ce que lui suggèrent les 9 besoins fondamentaux. Tout cela pour nous faire déboucher sur les conditions d’une planète vivable…
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La parole est ensuite donnée à Ben Brangwyn, un Californien coordinateur international de la transition. Selon lui, Totnes ne s’est ralliée à la transition qu’en 2005. Rob Hopkins est venu en 2006 et s’est alors posé la question d’un réseau, d’abord national, puis international. Ce réseau a un blog sur le net. Le thème : « La fête est finie ». Lors d’un meeting à Bristol, un président de conseil d’administration d’une fondation basée à Londres (Tudor Trust) a proposé de l’argent, beaucoup d’argent. Le principe du promoteur immobilier : « Je construis. Vous agissez ». « Nous faisons de l’écologie mais surtout de la justice sociale. » Le réseau a touché la France en 2008 avec la région du Triève et Paris.
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Aujourd’hui, 80 initiatives y sont dûment enregistrées. Partout se multiplient les initiatives locales, par génération spontanée. Se créent alors des hubs, centres de réseaux qui essaiment ensuite. Il existe un manuel de la transition, qui fait l’objet de « traductions participatives ». Ben a apporté des ouvrages de référence : The Transition Handbook, from oil dependency to local resilience (Le Manuel de la transition, de la dépendance au pétrole à la résilience locale), publié par Rob Hopkins en 2008. Local sustainable homes (La construction locale et durable de maisons individuelles), publié par Chris Bird en 2010. The transition companion, making your community more resilient in uncertain times (Le compagnon de la transition, ou comment rendre son voisinage plus résilient en des temps incertains), publié par Rob Hopkins en 2011.

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Jo Rotas © Carine Mayo
Jo Rotas © Carine Mayo


On nous emmène ensuite chez Jo Rotas, une femme seule, qui a déménagé en banlieue à l’occasion de l’opération « Rues en transition », lancée en 2008. Responsable de l’opération, Jo explique le processus. On a d’abord organisé de multiples réunions « Tupperware » pour éveiller les consciences. Il s’agissait d’expliquer à quel point le logement était un désastre énergétique. Au début, nous n’avions pas de stratégie et il a fallu nous recentrer. Nous avons souligné que, jusqu’à la dernière guerre, il y avait une convivialité entre les gens habitant une même rue. C’est fini aujourd’hui, sauf lorsqu’on se lance dans la résilience des « rues en transition ». Au total, nous avons touché entre 200 et 300 personnes. Nous avons édité un guide pour les groupes avec pour thèmes, dans l’ordre de priorité, l’énergie, l’eau, l’alimentation, les déchets et les transports. Le thème de l’énergie fait consensus, et l’eau aussi, car c’est dans le sud-ouest de l’Angleterre qu’elle est la plus chère. Pour les transports, c’est plus difficile. « Comment vais-je abandonner ma voiture personnelle ? »

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La dame qui nous reçoit chez elle habite Totnes depuis 30 ans. En 2009, elle a quitté le centre-ville pour trouver un logement moins cher. Elle n’a pas le gaz et se chauffe avec un poêle à bois (avec des radiateurs électriques en appoint). Grâce à l’opération Rues en transition, un groupe autonome s’est formé dans le quartier, composé de femmes, d’enfants … et d’un prêtre. D’abord, briser la solitude. Ensuite, tout un programme : on se contente pour boire de l’eau du robinet, et l’on recueille l’eau de pluie pour le jardin. On se lance dans la production de légumes dans le jardin. « C’est le bonheur ». On pratique le covoiturage. Pendant deux semaines, on se dispense du supermarché et l’on retrouve le plaisir des courses dans le petit commerce. On crée un cinéma de quartier, ouvert à tous. Est-ce qu’on se prive par force ? Non, tout est volontaire.

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Dartington Estate

Martin Crawford © Florence Leray
Martin Crawford © Florence Leray

L’après-midi, nous visitons le domaine de Dartington, qui compte 500 hectares et des bâtiments séculaires. Il a été racheté il y a 80 ans. Martin Crawford, formé à l’informatique mais passionné de botanique, nous reçoit dans sa « forêt jardin », un champ d’un hectare planté d’arbres en 1994. Autrement dit, une « forêt comestible », dédiée à la permaculture. En fait, il ne s’agit pas de forêt, mais d’arbres plantés il y a vingt ans dans un but très précis. Martin a planté des aulnes glutineux, qui poussent très vite et ont un feuillage très riche en azote, donc un engrais naturel. Il a aussi planté deux pins de Monterrey (Pinus radiata), résineux destinés à maintenir un espace dégagé pour les jeux d’enfants. Sous ces arbres de haute tige, élagués pour laisser passer la lumière, ont été plantés des arbres fruitiers (pommiers, cerisiers et même un pêcher). Au sol poussent une multitude de plantes d’usages divers. Certaines sont utilitaires, comme une plante de Nouvelle-Zélande qui fournit des fibres aussi solides que le raphia. D’autres sont alimentaires, comme les fougères ou les sceaux de Salomon, dont on peut manger les jeunes pousses. Les bambous, qui peuvent pousser de 5 mètres en 4 semaines, produisent de jeunes pousses tendres et donc comestibles, quoique parfois amères.

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Une mare a été creusée pour fixer les grenouilles, grandes consommatrices de limaces, et pour attirer les chauves-souris qui chassent au-dessus des plans d’eau. Les pins sont entaillés pour montrer l’écoulement de la résine. Martin nous présente une bûche ensemencée avec du mycélium de pleurotes, un champignon très apprécié. Puis ce sont des poireaux « sauvages » et un sorbier tibétain qui donne d’excellents fruits. Un ennemi : l’écureuil gris d’Amérique, qui dévore noix et noisettes aux dépens de l’écureuil roux européen. Il est donc capturé et euthanasié, conformément à la loi. Autres plantes alimentaires : la capucine tubéreuse et le shiitake, un champignon japonais cultivé sur bois mort, comme les pleurotes. Martin cultive là quelque 550 espèces de plantes. Les forêts jardinées et les petits jardins de permaculture représentent 500 hectares au Royaume Uni.

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Charlie et Eliot présentent leur projet aux JNE © Jean-Jacques Raynal


En fin de journée, rencontre au Horse Bay Inn de deux jeunes, Charlie et Eliot, 19 ans, avec leur mentor, une femme qui les aide à trouver leur chemin. Elle fait partie d’une association qui s’occupe des 18/25 ans, en âge d’aller à l’université mais qui n’y vont pas. Surtout depuis la fermeture du collège des Beaux-Arts. Charlie et Eliot veulent accéder à la terre pour construire et cultiver au pays. Un peu frigorifié à la terrasse du bistrot, notre groupe se divise en deux pour le dîner en ville. Retour à l’Old Forge sous la pluie.

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Troisième jour : Landmatters

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Le bus de l’association © Claire Lecœuvre

Le proprio de l’Old Forge, furieux de ne pas avoir touché les arrhes (une embrouille entre le Crédit coopératif et HSBC), se déchaîne dans les couloirs et tambourine aux portes des filles en réclamant son argent ! Il refuse de nous servir le petit-déjeuner. On doit lui verser 280 livres sur-le-champ pour qu’il accepte de nous servir le breakfast !

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Hal vient nous prendre avec un minibus de l’association, où nous entassons les bagages. Il nous emmène dans un domaine perdu sur un plateau venteux, où se sont installés des alternatifs. C’est « Landmatters », la terre me concerne, la terre compte pour moi. Nous chaussons nos bottes et arrivons au Communal, sorte de grande yourte faite de montants en bois et de bâches encordées sur des branches entrecroisées. L’intérieur a tout le confort : cuisinières et poêles à bois, électricité par panneaux thermiques. L’eau est au puits et les toilettes sèches à l’extérieur. Le mot d’ordre : « Internet avant les toilettes ». Un câble permet de se brancher au réseau.

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Carl Surridge © Myriam Goldminc
Carl Surridge © Myriam Goldminc


Nous sommes accueillis par Carl Surridge, un ostéopathe qui a rejoint la communauté il y a quatre ans. Landmatters (40 acres) a été acheté en 2003 par une vingtaine de pionniers plus ou moins anarchistes qui ont construit leurs logements sans permis. Il y a aujourd’hui huit maisons, habitées par des couples, avec ou sans enfants, ou des personnes seules, qui travaillent parfois en ville. La communauté dispose de trois véhicules pour covoiturage. Carl souligne que Landmatters ne se réfère à aucune idéologie, sinon la permaculture, c’est-à-dire un système qui se maintient tout seul, naturellement. « Nous ne pouvons pas rendre la nature meilleure, mais la nature nous rend meilleurs ».

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Trois principes : 1) Earth care (le soin de la terre). 2) Fair shares (chacun sa juste part). 3) People care (le souci des gens). Une coopérative sans hiérarchie, où les décisions sont prises par consensus. Pour trancher entre la pompe et le puits, la décision a été prise aux deux tiers (une pompe à bras). En cas d’échec, la terre reviendra à l’Association nationale de permaculture.

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La permaculture ? C’est le bon sens. On met les poules ici et le grain là-bas. Quant à l’argent pour acheter l’essence et le reste, il y a l’activité maraîchère et les soirées organisées au Communal (salle polyvalente). On organise des soirées musicales, des sorties scolaires, des mariages, des cours et conférences. Carl consulte un jour par semaine à son cabinet d’ostéopathe. Personne n’est à temps plein à Landmatters.

 

La serre de Landmatters © Sylvie Mayer
La serre de Landmatters © Sylvie Mayer


Nous visitons alors les lieux. Sur une grange : « Words are not enough » (les mots ne suffisent pas). Nous entrons dans une serre, qui n’est pas made in China, mais l’œuvre d’un designer de Totnes. En forme de coque de bateau renversée, elle repose sur du bois courbé (bender), recouvert de bâches plastiques. Elle a été faite en 15 jours avec des volontaires. « C’était fun » (on s’est amusé). Plus loin, une pâture a été plantée d’arbres pour le bois (chêne, frêne) et les fruits (cerisier). De tout petits arbres qui dépassent à peine de leur manchon protecteur. Les autres pâtures sont louées à des éleveurs de moutons. La communauté n’élève pas de moutons. Carl a cinq chèvres (une pour le lait et les autres comme reproductrices). Nous saluons une famille composée d’un Allemand, d’une Anglaise et d’un stagiaire français. Nous visitons la charmante maison ronde de Sharon, alors absente, faite de murs en traverses de rondins et terre, avec isolation en paille et toiture végétalisée. Une autre famille a deux cochons vietnamiens tout noirs, qui servent à enrichir et labourer le terrain. Ils ne seront pas mangés. Nous testons la pompe à bras qui sert l’eau potable sans traitement, puis les toilettes sèches et leur compost, recueilli dans des bennes en plastique.

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Nous retournons au Communal pour le déjeuner bio (conscious catering ou le traiteur concient). Au menu, une sélection de sandwiches. 1) Au jambon du Devon avec miel, moutarde et purée de rhubarbe maison. 2) Au fromage cheddar du Nord Devon avec céleri rémoulade. 3) Houmous maison aux carottes rôties et salade. Le pain vient d’une boulangerie locale. De fait, un seul sandwich vous cale, car c’est très bourratif. Au dessert : gâteau à la rhubarbe et aux amandes, ou fraises primeurs de Cornouaille (très bonnes). Carl répond alors à nos questions. La loi limite le village à huit maisons (qui, de l’extérieur, ont parfois des allures de camp de réfugiés…). Les autorités craignent toujours des éléments incontrôlés, la drogue, etc. Au début, en effet, c’était des aventuriers hors-la-loi. Puis sont venus les colons (settlers), plus respectueux des lois. Sur les dix adultes, il reste quatre pionniers du début, deux enfants et des stagiaires. Toutes les six semaines, on consacre une journée à l’échange entre membres du groupe, comme les Indiens, pour purger les conflits et dégonfler les crises.

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Avant de nous retrouver tous à la gare de Totnes pour le retour, nous prenons le chemin des écoliers qui descend du plateau et longe la rivière. Nous traversons un terrain de cricket frais tondu et des bois de chênes équipés en accrobranches. Très belle promenade avec vent et soleil. Les oies bernaches paissent dans le marais. Dernier coup d’œil à la nature avant le train et le métro.

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Ce voyage a été soutenu par Les jardins de Gaïa, les Quatre saisons du jardin bio,
les éditions Terre Vivante, les éditions Les petits matins
et les donateurs de Kisskissbankbank

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