Algérie : encore un pas vers le gaz de schiste

«Incontournable» : Youcef Yousfi, ministre de l’Energie et des Mines, l’a confirmé à propos de l’exploitation du gaz de schiste en Algérie.

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par M’hamed Rebah

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Youcef Yousfi est allé plus loin dans son allocution d’ouverture des journées d’étude sur les gaz non conventionnels organisées par l’Institut Algérien du Pétrole (17 et 18 septembre 2013 à Alger), lue par un de ses conseillers : « Nous sommes assez avancés pour proposer des projets concrets d’hydrocarbures non conventionnels (tight gas, shale gas et oil gas) ». « Nous avons déjà identifié des blocs pour l’exploration des shale gas (gaz de schiste) et nous avons demandé conformément à la loi sur les hydrocarbures, les accords nécessaires pour le lancement de ce type de projets », a-t-il précisé.

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Il ressort de ses propos que les données recueillies par les évaluations du potentiel en gaz de schiste dans notre pays, commandées par le groupe Sonatrach auprès de cabinets de consulting internationaux – et qui ont porté quasiment sur tout le domaine minier algérien – sont «encourageantes». Elles rejoignent, selon les cadres de Sonatrach, les estimations de l’Agence internationale de l’énergie (AIE). Les réserves avoisinent les 700 TCF (trillion cubic feet), dont 500 TCF sont des réserves récupérables que Sonatrach est en mesure d’extraire. Mais pour les profanes, y compris les journalistes qui ont rapporté les ont rapportés, ces chiffres et ces unités ne veulent absolument rien dire. C’est pourquoi, le cadre de Sonatrach qui les a livrés s’est cru obligé de préciser que « l’Algérie est au coude à coude en termes de réserves avec les Etats-Unis où le développement du gaz de schiste a connu un essor considérable. »

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Il n’y a rien de surprenant dans le contenu pro-gaz de schiste de la journée d’études, qualifiée de rencontre technique, consacrée aux gaz non conventionnels. En dehors de la petite phrase du Premier ministre, Abdelmalek Sellal, qui a laissé entendre que l’exploitation du gaz de schiste n’était pas pour demain, toutes les autres déclarations officielles, émanant du ministre de l’Energie ou de celui qui a été remplacé à l’Environnement ou même le ministre des Ressources en eau, ont constitué un plaidoyer direct ou implicite en faveur de l’exploitation du gaz de schiste. Les pouvoirs publics ont procédé spécialement à l’amendement de la loi sur les hydrocarbures pour y intégrer pour la première fois l’exploration et la production du gaz de schiste. Par vagues, les cadres et techniciens de Sonatrach sont envoyés aux Etats-Unis pour y recevoir la formation en vue du lancement de l’exploitation du gaz de schiste en Algérie.

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Dans la salle où s’est tenue la journée d’études, parmi les intervenants, selon les informations données dans le programme de la journée d’études, il n’y a que des pro-gaz de schiste, les uns par intérêt, les autres par mépris ou méconnaissances des exigences écologiques. Aucune voix contraire n’était prévue. Les associations de protection de l’environnement, opposées à l’introduction de l’utilisation de la fracturation hydraulique dans notre pays, n’étaient pas conviées, ni les experts qui ne partagent pas l’euphorie aveugle des pro-gaz de schiste. Pas de voix discordante, y compris dans la moindre nuance, n’a été prévue dans le programme de ces journées d’études. Les écologistes devront aménager un espace public alternatif pour exposer leurs positions sur l’aventure du gaz de schiste.

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Cet article est paru dans Reporters (quotidien algérien).

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