Sur la prétendue supériorité biodiversifiante des milieux ouverts

Dans le contexte de la rencontre organisée par les JNE le 8 janvier 2026 autour de sa pensée pour le 20e anniversaire de sa mort, nous mettons en ligne sur ce site un ensemble de textes de François Terrasson, en partie inédits. Voici un texte sur la prétendue supériorité des milieux ouverts.

Il est fréquent de rencontrer des affirmations péremptoires critiquant la « fermeture des milieux » assorties d’un appel à la promotion des espaces ouverts présentés comme le support préférentiel pour la diversité des espèces. Ces opinions vont même jusqu’à la mise en cause de la forêt, écosystème naturel de l’Europe occidentale. L’écologie scientifique montre en fait que le maximum de diversité se situe au contact des formations végétales fermées (plus ou moins) et des zones ouvertes (plus ou moins). Ce sont les écotones. Etant entendu qu’au sein des espaces fermés les phénomènes naturels dans leur complexité créent facilement sans intervention de l’homme certaines ouvertures. Par ailleurs il est exact que dans tous les groupes d’êtres vivants, certaines espèces préfèrent les steppes ou les savanes et vont rarement sous bois. Dans aucun cas ces espèces ne sont les plus nombreuses au sein de la catégorie considérée. Malgré l’intérêt des orchidées des pelouses sèches, la majeure partie des plantes de cette famille n’aime pas du tout les milieux très très ouverts. Parmi les oiseaux, l’Oedicnème criard, amateur de plaines sans végétation arbustive, est plutôt une exception. Même l’Outarde, oiseau considéré comme détestant la forêt, habite la « dehesa » espagnole, boisement clair mais bien éloigné des écosystèmes steppiques.

Le fait que certaines espèces soient adaptées au désert ne saurait faire de celui-ci un modèle d’aménagement du territoire. Les végétations puissantes et touffues, les taillis serrés, les broussailles et les jungles restent le refuge majoritaire du plus grand nombre d’espèces et le déclin de celles-ci provient non pas du manque de milieux ouverts, mais de l’extension de ceux-ci sous la pression de l’homme. C’est bien lui, citadin effarouché par la puissance végétale, qui fantasme une pseudo-écologie de rechange où les lieux ouverts sont préférés (associés parfois même à l’idée « mentalité ouverte » comme dans les arrachages de haies dans le remembrement) et présente des informations biaisées qui signent son ignorance du fonctionnent concret de la nature quand cela ne vas pas jusqu’à flirter avec la fraude scientifique.

Photo : François Terrasson © DR

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