Lundi Matin existe depuis bientôt 11 ans et diffuse chaque semaine un choix d’articles qui développent des analyses et contre-analyses du monde contemporain.
par Jocelyn Peyret
Selon Mathieu, membre de l’équipe éditoriale, le projet émane de la « volonté d’un grand nombre d’amis d’ouvrir un espace qui permette de faire se retrouver des champs assez différents qui peuvent aller de la science politique à la littérature, à la poésie. L’idée c’était de proposer une espèce d’endroit où ces différentes sensibilités, ces différentes modalités d’expression pouvaient se retrouver ».
Lundi Matin n’est pas à proprement parler un site d’actualité. Au sein de la rédaction, comme le développe Mathieu, « personne n’a jamais vraiment voulu faire du journalisme parce que ce n’est jamais trop ce qui nous a intéressé. Mais nous ne sommes pas pour autant hors de l’actualité. Il y a chaque semaine des textes qui parlent de l’actualité mais pas sur le mode journalistique qui consiste à juste exposer des faits et dire voilà il s’est passé ça. L’idée c’est toujours que ce soit agrémenté d’une analyse minimale, d’éléments qui nous permettent de mieux comprendre le monde plutôt que de juste le raconter. »
Pour réussir ce pari, « au tout début, on sollicitait beaucoup de gens. Aujourd’hui, la grande force de Lundi Matin n’émane pas de la rédaction, elle émane du fait qu’on a des complicités et des amitiés très larges. Nous, on orchestre ça, on voit ce qu’on publie, ce qu’on publie pas. Ça arrive cependant très régulièrement qu’on cherche des informations. Là, typiquement, en ce moment il y a des manifestations hyper intéressantes au Maroc. On se démène pour essayer de trouver des liens avec des gens au Maroc qui puissent nous raconter. »
Outre Lundi Matin, l’équipe présente également Lundi Soir, des entretiens hebdomadaires en vidéo. « Les invités sont très variables, on peut inviter autant des chercheurs qui ont sorti un bouquin que des personnes qui organisent et participent à la Mad Pride, une manifestation de gens qui se disent ou pas fous, une manifestation anti-psychiatrique. »
La rédaction de Lundi Matin multiplie les initiatives et ajoute à ses activités la publication d’une revue papier et la création d’une maison d’édition.
Pour la revue, dont sept numéros sont aujourd’hui parus, « on le fait un peu quand on a le temps. On aime beaucoup le papier et on y tient encore, mais bon, c’est très chronophage et vu que Lundi Matin, en soi, ça prend déjà beaucoup, beaucoup de temps on a un peu de mal à tenir le rythme. Sinon, en parallèle de ça, on a aussi une maison d’édition avec laquelle nous avons déjà publié plusieurs livres. Cette rentrée on lance une vraie activité éditoriale. Il y a des gens pas très connus, qui ne sont ni écrivains ni chercheurs, qui nous envoient des articles et qu’on trouve vraiment hyper, hyper bien. Et on se dit, ah, c’est vraiment dommage que cette personne là n’écrive pas de bouquin. Et donc, en l’occurrence, on leur propose d’en écrire un et voilà ! »
Tiraillé entre ces multiples versions et supports, Mathieu explique qu’ils ont choisi « la version web parce que c’était le truc le plus rapide, le plus pratique, le plus simple pour avoir une réactivité et pour pouvoir diffuser assez massivement des idées. Mais nous, à titre personnel, on préfère mille fois les livres à Internet. Cette histoire d’édition papier, c’est aussi une manière d’imposer une temporalité différente. Ce qui est très frustrant dans Lundi Latin, c’est que parfois il y a des articles qu’on trouve super bien et deux semaines après, ils sont complètement recouverts par les 30 autres articles qu’il y a eus. Et c’est le problème, pas que pour Lundi Matin, c’est le problème de l’Internet de manière générale, la surabondance, le flux continu de contenu. Ça a certes des avantages, mais aussi de gros désavantages. Pour compenser ça quelque part, on propose des livres qu’on pourra lire encore dans cinq ans ou dans dix ans, avec lesquels on prend le temps de lire. Les idées intéressantes sont souvent des idées complexes il faut un peu de temps pour les assimiler. Et c’est assez peu compatible avec le fait de lire un article en trois minutes, assis dans le bus ou dans le métro. »
Ces dernières semaines, deux plaintes en diffamation ont été déposées contre Lundi Matin à cause d’un article sur l’architecture et le greenwashing et pour avoir publié le droit de réponse d’un collectif féministe. Aucune date d’audience n’est encore connue pour la première affaire. L’audience de la seconde s’est déroulée mardi 30 septembre dernier devant la 17e chambre correctionnelle du Tribunal judiciaire de Paris. Le jugement sera rendu le 28 novembre.
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