Gestion des déchets urbains en Algérie : la course aux CET (centres d’enfouissement technique)

«On n’a pas d’idées, mais on a du pétrole», la formule inverse de celle qui a été inventée dans les années 1970 en France, s’applique parfaitement à la politique nationale de l’environnement et à tout ce qui s’y rapporte en Algérie.

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par M’hamed Rebah

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Les idées, c’était (et ça reste) la façon de faire des économies en argent et en ressources naturelles; le pétrole, c’est la tendance vers la dépense sans compter de l’argent et des ressources naturelles. Les idées, c’est aussi la prévention ; le pétrole, c’est agir après, à coups de budgets colossaux. Comment expliquer cette course dépensière, frénétique, à l’équipement au détriment de l’effort d’éducation et d’organisation à la base de toute politique d’économie de ressources naturelles et de prévention des risques écologiques. Celle-ci exige, il est vrai, une qualité plus élevée des institutions et du personnel qui les anime.

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Le discours officiel qui veut rassurer la population sur les capacités du pays à faire face aux besoins pressants, ne met pas suffisamment l’accent sur les gestes éco-citoyens «en amont» qui permettent d’éviter, «en aval», les crises et donc les dépenses en argent et en ressources naturelles engagées pour y remédier. En 2001, à Ouled Fayet, une décharge publique abusivement appelée centre d’enfouissement technique (CET) a été créée, sur une superficie de 45 hectares, pour recevoir les déchets urbains de l’agglomération algéroise. Elle sera fermée avant la fin de l’année, au grand bonheur des riverains, particulièrement les habitants de Baba Hassen qui avaient multiplié, en vain, les actions de protestation pour empêcher l’implantation de la décharge et avaient même obtenu gain de cause auprès du Conseil d’Etat, mais la décision de la justice n’a jamais été appliquée.

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Aujourd’hui, si le CET d’Ouled Fayet est fermé, ce n’est pas en raison des odeurs désagréables et des gaz polluants qui s’en dégagent, mais parce qu’il est temps d’investir pour la dépollution du site. Une entreprise étrangère viendra nous aider à faire disparaître les fumées et odeurs nauséabondes qui émanent des ordures que nous avons jetées dans la décharge d’Ouled Fayet. En attendant que le prochain CET, qui sera implanté à Hamici (dans la commune de Mahelma, ville nouvelle destinée à préfigurer le futur), soit opérationnel, la décharge d’Ouled Fayet continuera, «provisoirement», à recevoir les déchets.
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Selon les informations données par l’APS qui a rapporté les propos d’un responsable au ministère de l’Aménagement du Territoire, de l’Environnement et de la Ville, le CET de Hamici va mobiliser 95 hectares, c’est-à-dire le double de la superficie occupée par le décharge d’Ouled Fayet. Il recevra les déchets de la région ouest de la capitale avec une capacité, à terme, de 8 millions de tonnes. Les déchets de l’est de la capitale seront acheminés vers le CET de Corso, en attendant l’achèvement des travaux du CET de Réghaia, a indiqué la même source.

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Les Algérois pourront produire jusqu’à 18,5 millions de tonnes de déchets, volume qui correspond aux capacités de ces trois CET. Et s’ils produisent plus ? L’argent du pétrole sera encore une fois mobilisé pour construire d’autres CET. L’idée que l’on puisse agir «en amont» sur la production de déchets pour éviter de dépenser dans la construction de CET,  n’effleure l’esprit de personne dans ce pays. Tant qu’il y a du pétrole, on n’a pas besoin d’idées. C’est valable aussi pour la construction des centrales électriques et des barrages.

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Cet article a été publié dans le quotidien algérien Reporters.

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