Nicolas Hulot et la primaire de l’écologie

Les inscriptions pour participer aux primaires de l’écologie sont ouvertes jusqu’au 10 juin prochain.

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par Michel Sourrouille

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Nicolas Hulot paraît objectivement le mieux placé pour remporter cette primaire face à Eva Joly.

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En effet, il se prépare depuis plus de vingt ans et il possède une vision stratégique : l’urgence écologique. L’empreinte des humains est démesurée, nous vivons l’anthropocène, les dérèglements des écosystèmes sont généralisés.

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Nicolas sait tout cela, il a déjà écrit deux livres sur le « syndrome du Titanic ». Très tôt, il ne s’est pas contenté de ses émissions télévisées. Il lance en 1990 une Fondation pour la nature et l’homme, reconnue d’utilité publique : campagnes pour l’éco-citoyenneté, informations scientifiques sur l’environnement, sensibilisation aux enjeux de la biodiversité.

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Jacques Chirac, à l’époque maire de Paris, appréciait les émissions télévisées de Nicolas et souhaite de plus amples renseignements sur sa fondation. Sur son scooter, Nicolas franchissait les grilles de l’Élysée avec ses bouquins, apportant à Chirac une moisson de lectures écologistes. Des heures de conversation pour « déghettoïser » l’écologie en formant celui qui allait être appelé aux plus hautes fonctions en 1995.

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Début 2000, Nicolas Hulot souhaite devenir un acteur du débat public, mais il éprouve le besoin d’étayer ses convictions. Dans le cadre de sa fondation, un Comité de veille écologique lui apporte base scientifique et données rigoureuses. Ses membres sont tous des experts d’un sujet donné, et souvent chercheur dans les domaines sensibles comme la biodiversité, le climat, l’énergie…

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En pratique, tous les deux mois environ, ils se retrouvent à dix ou quinze autour de Nicolas. Divers ouvrages ont donc été rédigés, dont le plus visible a été Combien de catastrophes avant d’agir. Lorsque la campagne présidentielle de 2002 a commencé, Nicolas n’a pas manqué cette chance historique d’infléchir les événements. La promesse de Chirac d’une Charte de l’environnement « adossée à la Constitution », c’est un peu grâce à lui.

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Dès les premières phrases du discours de Chirac le 2 septembre 2002 au sommet de Johannesburg, le ton est donné :

« Notre maison brûle et nous regardons ailleurs. La nature, mutilée, surexploitée, ne parvient plus à se reconstituer et nous refusons de l’admettre. L’humanité souffre… »

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Ce texte était l’aboutissement d’années d’efforts pour faire partager par le Président les convictions auxquelles Nicolas était attaché.

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À partir de 2005, Nicolas Hulot élabore avec le Comité de veille écologique un « Pacte écologique ». L’enjeu est de le faire signer par tous les candidats à l’élection présidentielle de 2007.

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Devant l’inertie des candidats, Nicolas menace de se présenter. Alors, ils signent presque tous ; le faire, c’était l’espoir de rallier sur son nom au second tour tous ceux qui auraient voté pour Hulot au premier. Ensuite, les choses s’enlisent même si l’idée du Pacte écologique d’un ministre de l’écologie aux pouvoirs étendus est mise en place : demi-échec du Grenelle 2, abandon de la taxe carbone.

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La Fondation pour la nature et l’homme écrit en 2010 * :

« L’opinion doit accepter des contraintes opposées à ses désirs (de déplacements sans limites, de puissance sans limites, de consommation sans limites)… Si l’humanité n’est pas capable d’un sursaut moral assez tôt, il faudra s’attendre à l’effondrement général de la civilisation matérialiste industrielle. »

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Contre une telle destinée, Nicolas avait tout essayé, les émissions télé, le statut de conseiller des princes, la réflexion collective, les livres, le film, la pression sur les élections présidentielles. Nicolas se pose dorénavant la question : comment forcer le cours des choses ? Comment choisir les tribunes efficaces, peser sur la société ? Il ne lui reste plus qu’une chose à tenter, la présidence de la République. Le 13 avril 2011, il a franchi le cap.

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Nicolas Hulot et Eva Joly, les deux principaux candidats à la primaire de l'écologie - DR

Nicolas Hulot se lance dans la course aux présidentielles et fait appel à « celles et ceux qui ne se résignent pas au déclin conjoint de l’humanité et de la nature ». Pour Nicolas, l’étymologie ne ment pas : l’écologie n’est ni plus ni moins que la science de notre maison à tous. Loin des appareils politiques, il est en train de faire aujourd’hui avec l’économie ce qu’il a fait hier avec l’écologie. Les experts en mouvements de capitaux ont rejoint les spécialistes de la flore subsaharienne. Nicolas n’est plus l’électron libre qui n’avait jamais suivi des hommes, mais seulement des idées. Nicolas n’a pas envie que son fils Nelson dise plus tard : les salauds, ils savaient. Il rentre en personne dans l’arène politique, il participera aux primaires d’Europe Ecologie-Les Verts. Aux électeurs maintenant de juger…

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* Vers une société sobre et désirable, les vingt ans de la Fondation (Puf, 2010)

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Pour participer à la Primaire de l’écologie, il suffit de :

    Vous inscrire sur le site www.primairedelecologie.fr avant le vendredi 10 juin 14 h.
    Verser une contribution de 10 euros* permettant à toutes celles et tous ceux qui ne sont pas coopérateur-trice-s ou adhérent-e-s d’Europe Ecologie Les Verts (ou des partis associés à la Primaire) d’y participer, sans pour autant automatiquement adhérer au parti.
    Voter en ligne sur www.primairedelecologie.fr entre le 16 et le 23 juin à 9h ou par courrier avant le 24 juin. Le vote sera précédé de 3 débats publics entre les candidat-e-s : le 6 juin à Toulouse, le 9 en Île-de France et le 15 à Lille. Ils seront retransmis sur Internet. Vous recevrez par ailleurs entre le 15 et le 17 juin les professions de foi des candidat-e-s. 

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    Annonce des résultats le 29 juin.

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    * Un reçu fiscal vous sera envoyé pour vous permettre de déduire du montant de votre impôt sur le revenu 66 % de cette somme.

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    Le texte ci-dessus est paru en chronique des abonnés sur lemonde.fr et sur le blog de Michel Sourrouille.

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