L’arnaque des aires « protégées »

La stratégie nationale pour les aires protégées s’est fixée un objectif de 10 % en protection forte d’ici 2030. Cet objectif ne sera pas atteint, même en créant des aires « protégées » au rabais.

par Jean-Claude Génot

Récemment, une député naturaliste de LFI (vraisemblablement une rareté au sein du Parlement) m’a dit que lors de la COP 15 sur la biodiversité à laquelle elle participait, elle avait été très surprise de voir sur le stand de la France que l’Etat affichait 30 % d’aires protégées. Extraordinaire, n’est-ce pas ? Aucune personne informée sur les questions de protection de la nature n’est dupe de cette arnaque d’un Etat dont la seule boussole est l’économie et la croissance et qui ne fait rien de significatif pour freiner le recul de la nature en France, d’où le maquillage des mots. On sait bien que les parcs naturels régionaux et les zones Natura 2000, comptabilisés dans cette statistique, ne sont pas des aires protégées au sens strict. Ce tour de passe-passe a été d’ailleurs épinglé lors d’une émission diffusée récemment sur France 5. Ces aires ne sont pas protégées contre tout un tas d’activités économiques et de loisirs qui détruisent la vie sauvage (agriculture et sylviculture industrielle, chasse, pêche, extraction minière, industries polluantes, sur fréquentation touristique). Rien d’étonnant puisqu’un scientifique a démontré dans un ouvrage que notre politique de la biodiversité était faite pour échouer. Même la protection forte (cœur de parc national, réserve naturelle nationale, régionale et de Corse, réserve biologique intégrale) ne laisse aucun répit à la nature : pâturage et pression touristique dans les parcs nationaux, agriculture et/ou coupe de bois dans une majorité de réserves naturelles et chasse dans les réserves intégrale. Et quand ce ne sont pas des activités humaines maintenues pour la paix sociale, c’est au nom d’une gestion de la biodiversité que personne ne sait comptabiliser car elle est non mesurable. Tout se passe comme s’il fallait domestiquer la nature avant de la considérer comme digne de ce nom. La stratégie nationale pour les aires protégées s’est fixée un objectif de 10 % en protection forte d’ici 2030. Autant dire que l’objectif ne sera pas atteint, même en créant des aires « protégées » au rabais. Quand laissera-t-on la nature évoluer librement dans les aires dites protégées ? Nous avons besoin de véritables sanctuaires dédiés à la vie sauvage sans notre domination mais pour nous enseigner l’humilité.