« On veut sortir de manière juste et ordonnée des énergies fossiles », martèle Gaia Febvre, responsable des politiques internationales du Réseau Action Climat France qui regroupe 27 ONG nationales. Cet engagement, formulé clairement il y a deux ans lors de la COP28 à Dubaï, peine encore à se concrétiser.
par Mélissande Bry (envoyée spéciale des JNE à Belém)

En début de COP, le diplomate André Corrêa do Lago, président de cette édition, a décidé de ne pas mettre la sortie des énergies fossiles à l’agenda officiel afin de s’attaquer le plus rapidement possible aux négociations, mais le sujet revient constamment sur la table. Hier encore 19 novembre, lors de son allocution à Belém, le président brésilien Luiz Inácio Lula da Silva en a remis une couche malgré sa décision controversée d’autoriser l’exploration de pétrole au large de l’Amazonie quelques semaines avant le début du sommet mondial sur le climat.

Point positif : une coalition de plus de 80 pays, menée de front par la Colombie, souhaite remettre d’ici la fin de la semaine une feuille de route pour une sortie différenciée du gaz, du charbon et du pétrole. Le but du texte : faire une proposition concrète pour financer cette transition, notamment avec la contribution des pays du Nord, les grands pollueurs historiques. D’un autre côté, d’autres pays comme l’Arabie Saoudite ou l’Iran s’y opposent fermement pour ne pas avoir à réformer entièrement leur économie.

Comme le précise Lola Vallejo, directrice en diplomatie à la Fondation européenne pour le climat : « une grande partie des ressources en pétrole, gaz ou charbon sont aujourd’hui aux mains des États et, dans beaucoup de cas, les compagnies nationales d’énergie sont extrêmement liées aux énergies fossiles ».

Un autre problème de taille dans la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre : les lobbys. Cette année, la coalition Kick Big Polluters Out a comptabilisé près de 1600 représentants des énergies fossiles accrédités à la COP30, un record en termes de proportions. Interpellé dans les couloirs de la zone bleue (où se tiennent les négociations officielles) par Lorelei Limousin du Réseau Action Climat, Patrick Pouyanné, le PDG de Total Energies, a répondu aux critiques par des informations fausses tout en faisant preuve d’une condescendance et d’un sexisme éhonté.

Pour Gaia Febvre, « la place des lobbys dans les négociations est révélateur de l’utilité des COP, de la nécessité pour l’industrie fossile d’être présente dans les discussions pour en ralentir l’ambition. Le problème, c’est qu’on a pas de politique de conflits d’intérêts ». En effet, cette simple mesure pourrait, à l’avenir, garantir une meilleure qualité des participants aux conventions climatiques.
Enfin, le frein principal sur l’épineuse question de la sortie des énergies fossiles : l’impératif de trouver un consensus entre les 194 pays autour de la table. Pour Juan Carlos Monterrey Gomez, le négociateur en chef du gouvernement du Panama, « en vérité, le consensus tue l’ambition. Il est impossible qu’on atteigne le but qu’on s’est fixé si on continue d’opérer avec le même système qui nous a menés jusqu’ici ». Pour le remplacer par quo i? La question reste ouverte. Avec le feu qui s’est déclaré aujourd’hui même 20 novembre dans la zone bleue et qui a bloqué l’accès à la convention jusqu’au soir, les négociations sur le sujet risquent de tirer en longueur. Reste à savoir si les États arriveront réellement à s’accorder sur un texte ambitieux.
Photo du haut : « Faites payer les pollueurs ! », marche pour le climat lors de la COP30 à Belém le samedi 15 novembre © Mélissande Bry




