La « Revue Z », revue itinérante d’enquête et de critique sociale

Lors du salon de la micro-édition La Chèvre au Molodoï à Strasbourg du 25 au 27 avril dernier, la Revue Z, revue itinérante d’enquête et de critique sociale, présentait son n° 17 qui propose une immersion autour de la santé à Saint-Étienne (42).

par Jocelyn Peyret

Lou, membre de la revue rencontrée à Strasbourg, nous explique avoir « hérité de quelque chose en route qui a été créé en 2009 par certain.es, puis repris par d’autres, puis encore d’autres. Aujourd’hui, la majorité de l’équipe est en place depuis deux numéros ».

L’idée motrice de la revue, c’est qu’à chaque numéro le collectif « se déplace sur une ville ou un territoire donné, choisit à l’avance. Puis on va enquêter, rencontrer des gens autour d’une thématique. On va raconter depuis les luttes, depuis les gens qui résistent, qui s’organisent. On essaye un peu d’enquêter sur la destruction par le néolibéralisme, de laisser des traces d’initiatives qui existent ou qui ont existé, des nœuds qui traversent nos organisations. De trouver des équilibres entre documenter ce qui nous écrase et documenter aussi ce qui nous fait du bien ».

A l’automne dernier, le collectif s’est déplacé à Saint-Étienne pendant cinq semaines pour travailler autour des questions de santé, « de la destruction en cours du système de soins public, des gens qui s’organisent en dehors du système institutionnalisé avec l’idée de se demander, dans la séquence et la période de fascisation qu’on est en train de vivre, avec une destruction accélérée des services publics, ce qui se joue à cet endroit là. En fait, un des objectifs de la fascisation c’est de faire que les gens n’aillent pas bien, qu’ils n’aient pas l’énergie de se battre contre ce qui est en train d’arriver. D’isoler les gens. Face à cela, nous avons besoin de nous organiser, de préserver nos santés pour avoir de l’énergie, avoir de la force pour lutter et continuer à essayer de vivre une vie un peu heureuse ».

Pour le n° 17, ce qui a décidé le choix de la ville et de la thématique, c’est le fait que « deux copines stéphanoises du collectif étaient enceintes. Elles sont impliquées dans les luttes, en lien avec plein de monde sur place. On ne va pas n’importe où, il faut qu’on puisse avoir des contacts parce qu’en réalité ça passe vite notre séjour. C’est bien si en amont on a déjà un peu réussi à avoir des discussions avec des personnes qui sont motivées pour nous rencontrer, pour nous raconter un peu ce qui se passe ».

Les aspects logistiques sont aussi très importants à organiser : « on vit collectivement entre 10 et 15 personnes selon les jours pendant toute la durée du séjour. Ce qui était très très chouette, c’est qu’on a été hébergé.es par une personne qui avait une maison vide en attendant des travaux. Elle nous l’a prêtée gracieusement. Pour le numéro précédent, on était en Seine-Saint-Denis, hébergé.es dans des squats. Cet aspect matériel est vraiment primordial pour le choix d’un numéro ».

Une fois dans les murs, « il y en a qui vont un peu à tous les rendez-vous militants en essayant de rencontrer du monde. D’autres vont passer beaucoup de temps dans les hôpitaux, rencontrer des syndicalistes, des professionnels de la santé, des collectifs qui s’organisent autour de ça. Puis, au fur et à mesure des semaines, se dessinent des sujets qui prennent un peu plus d’importance. Il y a aussi des gens qui savent dès le début sur quoi iels veulent travailler. On amasse énormément de matière avant que ne vienne un temps un peu plus douloureux où il faut faire des choix.

Dans chaque numéro, l’idée c’est aussi de proposer une photographie à la fois autour du thème et à la fois autour de la ville, du territoire où on enquête. Pour nous, c’est difficile de parler de Saint-Étienne, de comprendre les enjeux actuels sans tirer des fils historiques. Il y a un gros terreau de solidarité qui n’est pas tombé du ciel. Il y a une histoire industrielle, une histoire ouvrière qui est importante, liée à l’immigration européenne et postcoloniale. On a à cœur de documenter ça, mais avec un regard critique. De comprendre ce qu’il y a à raconter sur la ville à travers le prisme de la santé.

La santé, ce n’est pas juste avoir accès aux soins  C’est avoir de bonnes conditions de logement, de la bouffe dans son frigo. C’est avoir de bonnes conditions d’existence ! On a une approche globale. Par exemple, il y a un article sur une parodie stéphanoise de « Plus belle la vie » qui s’appelle « La vie plus belle ». C’est une sorte de remake local qui tourne depuis plusieurs années avec des gens qui jouent plusieurs personnages. Chaque mois, c’est projeté dans un cinéma, à prix libre, et la thune finance des luttes locales. C’est toujours blindé. Pour nous, c’est aussi une façon de prendre soin de soi, de trouver de la joie dans notre quotidien, de fabriquer des choses ensemble. Même si ce n’est pas directement politique, nous on trouve beaucoup de sens là-dedans.

Et du coup, on documente aussi ces petites histoires là parce que ça fait du bien en fait ! »

Pour aller plus loin :
– Revue Z : https://ladernierelettre.fr/revue-z/
– Salon La Chèvre : https://azqs.com/lachevre/
www.lesautresvoixdelapresse.fr émission n° 280

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