Une expo à Bordeaux sur Elisée Reclus (1830-1905)

Notre ami Olivier Sigaut (JNE) a inauguré le 18 février à Bordeaux une exposition consacrée à Elisée Reclus, précurseur méconnu de l’écologie.

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par Roger Cans

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7 affiche reclus finale pt webCe fils de pasteur de Sainte-Foy-la-Grande (Gironde), formé dans divers collèges protestants de France et d’Allemagne, a découvert la géographie à Berlin. Il a ensuite couru le monde, toujours à la recherche des rapports entre l’homme et la nature. Mais sa culture anarchiste l’a fait mal voir en France, de sorte qu’il est aujourd’hui plus connu à l’étranger que dans son pays natal.

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L’exposition du « Boulevard des potes », dans le vieux Bordeaux, présente un ensemble de documents concernant Elisée Reclus, son œuvre (abondante), sa famille (nombreuse) et les personnages multiples qui ont déterminé sa vocation de géographe, de militant de l’éducation populaire et d’anarchiste en rupture de ban avec la société de son époque. On y retrouve les portraits de Kropotkine, Bakounine, Carl Ritter, Ferdinand Buisson, les frères Pereire, Fourier, Proudhon, Flora Tristan, qui l’ont initié à l’anarchisme, à la laïcité, au socialisme et à l’éducation libertaire.

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S’appuyant sur un montage de diapositives, intitulé « Du protestantisme à l’anarchisme », Olivier Sigaut a passé en revue la vie originale et mouvementée d’Elisée Reclus. Celui-ci est le troisième d’une fratrie de 14 enfants, né en 1830 à Sainte-Foy-la-Grande, petite ville de tradition protestante installée au bord de la Dordogne. Son père y est pasteur de l’Eglise Réformée de France, mais, à la suite de la rencontre d’un pasteur suisse adepte du « réveil », il donne sa démission et rejoint une communauté évangélique à Orthez, dans le Béarn, avec une partie de sa famille. Les deux frères Elie et Elisée restent en Gironde, élevés par leurs grands-parents.

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Pour s’assurer que ses fils aînés reçoivent un enseignement correspondant à son idéal, le pasteur expédie Elie et Elisée chez les « Moraves », un collège protestant d’Allemagne. Les deux fils y apprennent surtout les langues étrangères. Elisée étudie ensuite la théologie à Montauban et passe son bac à l’université de Bordeaux. Il perd la foi et découvre la géographie avec un professeur de l’université de Berlin, Carl Ritter. Il a trouvé sa vocation.

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Le coup d’Etat du 2 décembre 1851 conduit les deux frères républicains à manifester leur opposition. Elisée s’installe alors en Angleterre, où il donne des cours pour vivre. Il voyage et publie beaucoup. Il s’installe à la Nouvelle-Orléans, puis en Colombie, où il s’essaie à l’agronomie tropicale. Echec. De retour en France, il va être repris par les événements de la Commune, durant laquelle il est arrêté les armes à la main et condamné au bannissement. Il échappe à l’exil grâce à l’appel de la communauté scientifique internationale, dont Charles Darwin.

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__lis__e reclus au bdp le 18 f__vrier 001C’est alors que, pour nourrir sa famille – une femme métisse et deux filles –, il se lance dans la rédaction de guides touristiques (Londres, l’Italie, la Côte d’Azur) puis d’ouvrages destinés à la jeunesse, publiés par Hetzel (l’éditeur de Jules Verne), comme L’histoire d’un cours d’eau ou L’histoire d’une montagne. Il publie des ouvrages prémonitoires, comme La Terre à vol d’oiseau, sans doute à l’origine de La Terre vue du ciel de Yann Arthus-Bertrand… Son ouvrage La Terre et l’Homme est illustré en couverture par un artiste tchèque qui montre, un siècle avant la mission Apollo 11, le globe terrestre vu de l’espace, avec la géographie de ses continents.

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Dès lors, Elisée Reclus ne cesse d’écrire articles, plaquettes et ouvrages de référence. Mais son œuvre majeure reste La nouvelle géographie universelle, publiée par Hachette en 19 volumes avec cartes. Cette publication, écrite d’un style élégant, fait le tour du monde et est traduite en de multiples langues. Lorsqu’il meurt en 1905, son œuvre est adulée à l’étranger, notamment dans les universités (mais pas en France). Pour la première fois, en effet, la géographie n’est plus militaire (« un moyen de faire la guerre », comme dit le géographe Yves Lacoste) mais civile, destinée à faire connaître la planète Terre à tous, et si possible à la faire aimer et respecter.

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L’exposition se tient à Bordeaux, au Boulevard des potes, 29 rue Bergeret, dans le quartier Saint-Michel-Capucins, du 19 février au 2 mars. Ouvert du lundi au vendredi de 10 h à 19 h .

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