BiObernai 2014 – Table ronde sur les entreprises citoyennes

Voici notre compte-rendu de la table ronde consacrée à l’entreprise citoyenne au cours du salon BiObernai 2014.

 

par Roger Cans

 

Photo  BiObernai / Pascal Bastien
Table ronde sur l’économie citoyenne au Salon BiObernai 2014 – Photo BiObernai / Pascal Bastien

 

 

Il est 14 h lorsque le car nous amène au salon BiObernai, où nous avons juste le temps de déjeuner (lasagnes au potimarron) avant la table ronde inaugurale organisée à la salle des fêtes.

 

C’est le journaliste Philippe Chibani-Jacquot qui anime la table ronde, consacrée à l’économie sociale et solidaire, ou plus précisément à l’entreprise citoyenne.

 

 

L’aventure d’ENVIE

Serge Reutenauer présente l’aventure d’ENVIE à Strasbourg, lancée il y a trente ans par des étudiants bénévoles pour le groupe Emmaüs de l’abbé Pierre. L’objectif était de redonner une seconde vie à l’électro-ménager considéré comme hors d’usage. Pour cela, ENVIE a constitué une flotte de véhicules pour collecter les appareils jetés dans le Haut-Rhin. Aujourd’hui, ENVIE s’est spécialisé dans le démantèlement des appareils en fin de vie, avec récupération des liquides ou autres éléments polluants, d’où le statut d’installation classée.

 

ENVIE dispose de 14 sites en France, avec 600 salariés. Sans oublier les 2.000 volontaires pionniers de l’économie circulaire. Depuis 2006, ENVIE est prestataire de services pour des organismes comme Ecosystèmes ou Recylum. Le recyclage est devenu un marché concurrentiel, avec appels d’offres. ENVIE recrute donc des ingénieurs qualité et mutualise les bonnes pratiques. Il recrute aussi par contrats d’insertion pour le démantèlement manuel (130 salariés). En 2013, 10.000 tonnes de déchets électro-ménagers ont été traités à Strasbourg, qu’ils aient été rapportés chez Darty ou apportés directement à ENVIE.

 

Schroll, Gripple et Cie

Fabrice Launay présente ensuite le groupe Schroll, « partenaire historique de BiObernai ». C’est une entreprise familiale de Strasbourg Neuhof, spécialisée dans le tri des déchets. Schroll favorise l’emploi local, la proximité et se préoccupe de l’empreinte carbone. Elle a 50 salariés et un chiffre d’affaires de 300 millions. Elle a des sites à Mulhouse (Papivore) et à Colmar, où elle emploie 14 travailleurs handicapés sur une chaîne de tri. Les centres de tri sont visités régulièrement par des scolaires, afin d’en faire des ambassadeurs du tri.

 

Denis Anthoni présente la société Gripple, une boîte originale qui emploie 35 salariés à Obernai. Nous la visiterons demain. Pierre Hoerter, viticulteur, présente la société Soli’Vers, dont il est PDG. Nous la visiterons également demain (lire notre article ici).

 

Catherine Trautmann, ancienne ministre de la Culture, ancienne maire de Strasbourg, ancienne députée européenne et actuellement vice-présidente de la Communauté urbaine de Strasbourg, témoigne à son tour. Elle a bien connu l’entreprise Schroll, car son père était inspecteur des installations classées. Mais c’était l’époque où le tri des déchets était mal considéré. Elle constate que les quatre entreprises présentées ont relevé un défi : ouvrir une activité classique à l’innovation sociale. Elle souligne que les collectivités doivent se préparer à accueillir des entreprises d’insertion professionnelles, par appels d’offres. Elle regrette que l’Union européenne, après Jacques Delors, ne fasse plus rien pour l’économie solidaire. Au Parlement européen, la clause d’insertion a été difficile à obtenir. Elle rappelle que lorsqu’elle a lancé l’appel d’offres pour le tramway de Strasbourg, elle a dû tourner le code des marchés publics pour permettre l’embauche de travailleurs de plus de 45 ans !

 

Siel Bleu

Lucie Erb présente son groupe associatif Siel Bleu, créé il y a 17 ans par des étudiants de Strasbourg qui se préparaient au professorat de sports. Ils voulaient encourager des activités physiques adaptées et aider à la prévention pour la santé. L’association, qui est financée par divers partenaires (collectivités locales, Institut Curie, Danone, etc.), dispose aujourd’hui de 400 salariés, mis à la disposition de 400.000 bénéficiaires en France. « Nous ne vendons que du bien-être, du sourire, de l’humain », dit-elle. Avec le Fonds Danone appelé Nutritia, qui dispose de 15 antennes départementales, les employés de Siel Bleu s’efforcent de mieux nourrir les pensionnaires de maisons de retraite et de leur proposer des activités physiques adaptées.

 

 Gaz vert

Clément Ritter, responsable de la communication de Suez Environnement dans le Grand Est (Alsace, Lorraine et Franche-Comté) explique que son groupe a signé en 2007 un premier accord de partenariat avec la ville de Strasbourg, afin de lui fournir du gaz « vert ». Une innovation écologique : la machine à recycler les enrobés. Traditionnellement, les terrassiers qui ouvraient les tranchées pour réparer les fuites de conduites d’eau jetaient l’enrobé de la chaussée à la benne. Le bitume était donc perdu. Aujourd’hui, la machine, confiée à une entreprise d’insertion, permet de reboucher les tranchées avec le même enrobé recyclé.

 

Jean-Yves Montargeron, directeur d’Alsace Active, explique comment sa société met en contact les entreprises et les associations afin de « lier la performance sociale à la performance économique ». Alsace Active fait de l’appui et du conseil aux créateurs d’entreprise et aux collectivités. Elle a créé 70 partenariats entre 150 entreprises et 300 associations.

 

Au vin d’honneur qui clôt la table ronde, Catherine Trautmann poursuit le débat : « Il faut accompagner les créateurs d’entreprise, mais aussi les repreneurs, car il y a une forte mortalité ! Oui, il est bon de faire se rencontrer les entrepreneurs classiques et les entreprises solidaires. Mais il faut convaincre les banquiers. Les élus, en général, écoutent, mais les fonctionnaires tordent le nez ! ». Croit-elle que le Parlement européen restera à Strasbourg ? « Oui, bien sûr. On a assez des capitales d’Etat ! ».

 

Ce reportage a été réalisé dans le cadre du voyage JNE au Salon BiObernai 2014.